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Acariens, à ne rien y comprendre

publié le 07/09/2021 | par Delphine Prince

D’ordinaire, en cette période, nous pouvons affirmer « Avec la rentrée, les acariens sont de retour ».

Cependant si les patients allergiques aux acariens se mouchent, éternuent, ronflent, sifflent de nouveau, ce n’est pas…nouveau car leurs symptômes sont de retour, dans le nord de la France tout au moins, depuis le cœur de cet été à l’hygrométrie automnale et aux températures qui sont restées clémentes. Les quelques jours de beau temps que nous vivons devraient peut-être leur donner du répit.

Tandis que les patients allergiques aux pollens de graminées, contrairement aux deux saisons précédentes, après quelques semaines difficiles en mai et en juin ont été ensuite relativement épargnés.

L’allergie aux acariens est la première cause d’allergies respiratoires en France. Les acariens sont un des constituants de la poussière de maison parmi de nombreux débris, particules organiques et non organiques qui constituent cette poussière.

Episode 1 : Qui sont les acariens ?

Les acariens mesurent entre 0,2 et 0,4 mm (200 à 400 micromètres). Ils appartiennent à la famille des arthropodes et à la classe des arachnides (en gros, ce sont des araignées microscopiques).

On dénombre plusieurs milliers d’espèces d’acariens. Les acariens participent dans les différents écosystèmes à la dégradation et au recyclage des matières organiques. Ils sont ubiquitaires et on les trouve aussi bien dans les fonds marins que sur terre, sur les végétaux, les animaux (humains compris) et dans leurs habitats (dans nos lits par exemple).

Toutes les espèces d’acariens ne sont pas allergisantes.

Les espèces allergisantes auxquelles nous sommes exposés dans nos régions sont principalement les acariens de la poussière de maison, les « mangeurs de peau » : Dermatophagoides Ptéronyssinus et Dermatophagoides Farinae. Ce sont des aéroallergènes : nous y sommes exposés par le contact de l’air et de la literie d’où une clinique qui correspond principalement à leur voie de pénétration dans l’organisme : rhinite, conjonctivite et asthme.

D’autres espèces allergisantes d’acariens existent :

Sont présents aussi sous d’autres latitudes les acariens tropicaux tels que Blomia Tropicalis,

Les acariens de stockage, avec de possibles expositions domestiques (débris alimentaires) surtout professionnelles (boulangerie, milieu agricole). Je ne résiste pas au plaisir de vous en donner les noms, tant est beau le vocabulaire de l’allergologie : Glycyphagus domesticus, Lepidoglyphus destructor, Acarus siro et Tyrophagus putrescentiae.
Certaines espèces d’acariens à potentiel allergisant sont maintenant utilisées comme auxiliaires de lutte biologique. L’un de mes patients, commercial dans le domaine agricole présentait une allergie professionnelle à ces agents. Il était également sensibilisé aux acariens de la poussière de maison. Même si sa rhinite et sa conjonctivite ne se manifestaient qu’au travail (démonstrations dans les cultures), une désensibilisation aux acariens de la poussière de maison a permis d’amender ses signes.

Exercice : essayez de prononcer très vite les noms des acariens suscités. Cela a plus de classe tout de même comme virelangues que « les chaussettes de l’archiduchesse ». Non ?

Précisons que contrairement à d’autres arachnides tels que les araignées, les tiques, les aoûtats, les acariens de la poussière de maison ne sont aucunement des insectes piqueurs.

Présents à nos côtés jusque dans nos lits, leur fonction est la dégradation de la kératine de nous débris de peau, ongles…Si le matin vous vous réveillez avec de multiples piqures et que vous soupçonnez le rôle des insectes présents dans la literie, mettez plutôt en examen les punaises de lit…

Pour ceux d’entre nous, les personnes atopiques, dont le système immunitaire déclare la guerre non seulement aux agresseurs (virus, bactéries, parasites, levures pathogènes) mais aussi à des éléments inoffensifs de l’environnement, en synthétisant des anticorps IgE contre l’un des éléments constitutifs de l’acarien, les protéines allergisantes, l’histoire est toute autre. C’est ici, à chaque contact, le déchainement, l’emballement du système immunitaire qui aussitôt la barrière franchie se met en alerte afin de barrer la route à « l’agresseur » ce qui conduit à l’inflammation et aux symptômes.

On retrouve les allergènes des acariens dans les corps vivants ou morts des acariens, leurs larves et œufs mais aussi dans leurs particules fécales (protéines fabriquées dans le tractus digestif). La taille relativement lourde de ces allergènes (10 à 35 micromètres) fait que s’ils sont bien en suspension dans l’air, on y est surtout exposés par le contact direct de notre literie.

L’allergie à la « poussière de maison » est décrite depuis 1921 par Kern qui le premier a réalisé des tests cutanés avec de la poussière de maison.

En 1964 : La science progresse de nouveau : finies les soupes d’allergènes et autres particules : Voorhorst et Spieksma démontrent que les acariens sont la source principale des allergènes dans la poussière domestique. On testera désormais les acariens, produits par culture par les laboratoires fabricants de produits de tests et non plus la poussière de maison.

On sait maintenant distinguer et synthétiser parmi les nombreuses protéines produites par les acariens celles qui sont des protéines allergisantes et leur connaissance progresse. Si l’allergologue ne dispose encore que des acariens pour la réalisation de tests cutanés, il peut affiner le diagnostic de l’allergie par la recherche en laboratoire d’Ig E spécifiques produites vis-à-vis de certaines de ces protéines.

Rappelons que pour que la réaction allergique se manifeste, la conjonction d’une prédisposition génétique (l’atopie) et d’un environnement favorable (l’exposition) est nécessaire. Il est démontré qu’une diminution de l’exposition chez l’allergique permet de réduire les signes.

Nous verrons dans l’épisode 2 quelles sont les principales sources d’exposition domestique et comment les réduire.

En attendant, je souhaite à tous les lecteurs jeunes ou moins jeunes une bonne rentrée. Car le mois de septembre n’est-il pas, bien plus que le premier de l’an, le véritable début d’une année nouvelle ? Celui des bonnes résolutions : « J’arrête de fumer », « Je vais l’inscrire au club sportif », « Je range ma maison » ?

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